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Flux de rédaction : la preuve par l’exemple avec Olivier Tesquet, de Télérama

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Flux de rédaction : la preuve par l’exemple avec Olivier Tesquet, de Télérama

Les grands événements sont l’occasion de vérifier certaines théories plus ou moins fumeuses. Il y a quelques semaines nous avions développés ici même les grands principes du flux de rédaction.

Ce week-end de second tour les a confirmées avec le reportage en temps réel sur le terrain d’Olivier Tesquet, journaliste à Télérama parti suivre et comprendre la vie de ses confrères lors du dernier week-end des Présidentielles. A Tulle.

Olivier, en journaliste maîtrisant les outils web, ne part pas deux jours (à Tulle) juste pour parler rugby ou écouter de l’accordéon.  Il publie tout au long de son périple via les multiples applications disponibles sur mobile (parfois, il prend des notes avec un papier et un crayon, comme vous pouvez le découvrir dans ses réponses ci-dessous).

Et de retour à la rédaction, il met en ligne un papier qui reprend et surtout raconte, avec un début et une fin, ce qu’il a déjà envoyé la veille.

Twitter, instagram, tumblr

Olivier, donc, utilise twitter. S’il y a bien un outil récent qui change la donne du reportage, c’est twitter. Un outil basique, gratuit, accessible à tous, qui permet aux lecteurs, tranquillement calés à des centaines de kilomètres du journaliste, de suivre la scène.
Et sur twitter, Olivier y balance un grand nombre de messages pour un événement comme celui-ci – un peu plus de 200 rangés deçi delà. Largement de quoi suivre son périple en “vue subjective”, la preuve ci-dessous.

 

 


 

Il prend des photos, aussi. Au point que son reportage est illustré d’instantanés instagramés, envoyés en direct au moment de la prise de vue, puis réutilisés au sein de son papier du lendemain.

 

 

Et comme il n’a pas utilisé toutes ses photos pour illustrer son article, il utilise un troisième outil pour toutes les rassembler en un endroit propre. C’est bien rangé, comme ça. Il a ouvert un site via tumblr pour ses photos de Tulle.

 

Les explications d’Olivier

Pour comprendre comment Olivier travaille, nous lui avons soumis quelques questions via un google doc.

 

  • Bonjour Olivier, peux-tu nous expliquer pourquoi tu publies ces infos en temps réel ? C’est naturel ? Une demande de la rédaction ?

Comme pour la soirée du premier tour, Télérama a choisi de mettre en place un dispositif spécial, autour d’une quinzaine de personnes. Certains sont présents dans les QG des partis, d’autres aux sièges des chaînes de télévision.
D’autres encore sont envoyés spéciaux, comme mes collègues Nicolas Delesalle (qui a suivi les “motojournalistes” en scooter), Erwan Desplanques (scotché à Serge Moati pour la fin du tournage de son documentaire sur la campagne), ou moi-même, à Tulle.

Au service medias, nous avons décidé de tous live-tweeter la soirée, les meilleurs tweets étant repris dans un CoverItLive géré par les équipes de Télérama.fr. Dès la fin du live, vers minuit, chacun a envoyé ses premiers éléments d’ambiance, classés par ordre chronologique, pour un article “coulisses” à plusieurs mains publié le lendemain matin, et censé retracer la soirée de la veille selon notre angle “médias”. Comme nos reportages sur le terrain ont offert une matière conséquente, nous avons ensuite décider d’écrire des papiers plus anglés, que ce soit pour la “poursuite” à scooter ou mon déplacement à Tulle.

 

  • Y a-t-il des moments où tu te dis : “ça, je le garde pour le papier à venir” ?

Dans un cas comme celui de Tulle, où tout va très vite, c’est très difficile de cumuler prise de notes et live-tweet. Donc je me sers de Twitter comme d’un carnet dans lequel je note des éléments d’ambiance, quelques blagues, des anecdotes.
Le lendemain, au moment d’écrire mon papier, je peux venir piocher dedans, et avoir un canevas déjà ordonné. Je garde quand même quelques éléments sous le coude, que je note par écrit en les time codant, afin qu’ils s’articulent au mieux avec mes tweets (déjà time codés).

Sur une soirée électorale, a fortiori quand il s’agit d’une présidentielle, c’est frustrant de faire de la rétention, alors je lâche déjà beaucoup de choses en temps réel. Ca peut donner l’impression au lecteur que je remâche ce que j’ai produit la veille, mais pour moi, le but est justement d’extraire une narration et du sens de dizaines de tweets alignés les uns à la suite des autres.

 

  • Quels sont tes outils / applications pour ce type de déplacement ?

Twitter et Instagram, principalement, en essayant de créer ponctuellement des passerelles entre les deux. Je prends quelques notes sur mon iPhone, c’est parfois plus rapide que d’attraper un carnet (j’ai d’ailleurs remarqué qu’une bonne partie des rubricards politiques fonctionnait de cette façon).

 

  • Tu as utilisé instagram cette fois-ci. Twitpicais(??)-tu déjà des photos avant instagram ? Ou est-ce instagram qui t’as lancé dans le « photo » reportage ?

Avant Instagram, j’utilisais déjà l’outil dédié de Twitter pour immortaliser des instants, mais je n’avais aucun endroit où les retrouver, elles flottaient et n’avaient qu’une durée de vie extrêmement limitée. Avec Instagram, je peux mettre un joli filtre en deux clics, partager ou non la photo sur Twitter, créer une narration propre qui n’a pas forcément besoin de Twitter.
Certains tiqueront en disant que c’est trop facile, mais pour des journalistes qui ne sont pas photographes, c’est quand même un outil super complémentaire.

 

  • Comment gères-tu la batterie de ton mobile ? En as-tu plusieurs ?

Pour le second tour, nous devions être équipés de coques spéciales, mais elles sont arrivées trop tard, donc j’ai du composer avec les moyens du bord. Je me suis efforcé d’arriver chargé à bloc à Tulle, et j’avais pris mon iPad au cas où je trouverais un peu de wi-fi dans un café. Ensuite, dès que j’ai pu trouver une prise secteur ou le port USB d’un ordinateur gracieusement prêté par un confrère ou un consoeur, j’ai sauté sur l’occasion. Ca m’a permis de ne jamais tomber complètement en rade de batterie, même si ça nécessite de jongler et de courir un peu.

 

  • Quel type d’outil ou d’appli te manque-t-il éventuellement pour bosser mieux / plus vite / différemment… ?

La configuration actuelle me convient plutôt bien. Je pense qu’un outil complémentaire réclamerait la greffe d’une troisième main.

 

  • As-tu observé d’autres journalistes avec toi qui twittaient ? Beaucoup ?

La plupart des rubricards politiques ont pris le pli depuis longtemps, notamment parce que les politiques tweetent de plus en plus, et que ça permet une interaction qui n’existait pas avant. Le off se déplace, voire tend à disparaitre. Mais dans le cas de Tulle, la plupart étaient trop occupés à écrire en direct leurs articles pour pouvoir vraiment live-tweeter la soirée.
Quand Hollande prononce son discours par exemple, ils se concentrent sur son propos, et le retranscrivent directement dans l’article qu’ils sont en train de finir pour leur rédaction. Moi, j’essaie de faire un pas de côté pour commenter ce que je vois, c’est à dire non seulement le discours, mais l’écosystème médiatique dans lequel je l’observe.

 

  • Ou qui consultaient leur mobile (au moins) ?

cf. question précédente

 

Ami lecteur, utilises-tu les mêmes appli qu’Olivier ? Timecode tu aussi tes prises de notes ? Refuses-tu de faire ce que fait Olivier, parce que tu considères que ce n’est pas du journalisme ?

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Cedric
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