Données fleuries #10
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Le marché de l’art pour les nuls est un brillant dossier de datajournalisme concocté par la fine équipe d’AskMedia (Marie Coussin, Marie Conquy et Bénédicte Lutaud) et l’inénarrable Jean Abbiateci. Données solides à l’appui, le dossier présente une vue d’ensemble du marché de l’art aujourd’hui en mélangeant visualisations, tableaux et analyse.
Découpé en quatre courts chapitres (« L’art, un hobby pour milliardaires », « Picasso, la superstar de l’art ! », « Pas de place pour les femmes ! » et « Le Grand Bond en avant de la Chine »), ce travail d’équipe est pédagogique, offre l’essentiel des données de base et s’illustre (notamment) par une application interactive bien conçue présentant « le Top 50 des artistes les plus bankables » ainsi que par une datavisualisation à bulles passant 320 oeuvres d’art à la loupe. Cette dataviz est une mise-à-jour d’un travail effectué par Jean Abbiateci l’an dernier. Ce dossier « Le marché de l’art pour les nuls » (qui existe aussi en anglais) a été présenté aux Datajournalism Awards. On lui souhaite évidemment le meilleur.
Ah. Et à mon humble avis, si les femmes sont si mal représentées dans le Panthéon des peintres (ce qui ne manque pas d’offusquer le trio de rédactrices), c’est sans doute parce que ces dames sont très (très) souvent magnifiées sur la toile. Mais c’est juste un avis.
La minute bidouille
Créez vos propres KML avec Google Maps est un petit tutoriel immanquable du compère Raphaël da Silva. En France, quand on veut créer une carte un peu découpée, avec des territoires identifiables, on est un peu obligé de s’astreindre à une nomenclature encore fermée (par l’IGN et par l’Insee pour ne pas les nommer). Le but ici est donc d’apprendre à effectuer ces découpages soi-même.
Un didacticiel bien goupillé, pas révolutionnaire, mais qui filera un bon coup de main aux cartographes en herbe. Pour l’instant, Raphaël a fait le choix d’expliquer sa manipulation sur Google Maps parce que les résultats sont extrêmement satisfaisants, mais je ne doute pas qu’il finira par craquer et nous délivrer un jour un joli tutoriel pour bosser sur OpenStreetMap.
La minute open data
Bon, le site du Ministère de la Culture est plutôt moche original encore en version beta mais il serait injuste de passer sous silence le bel effort pour proposer une infographie décente visant à promouvoir « une stratégie numérique de diffusion et de réutilisation des données publiques numériques du secteur culturel » (ouf). Si l’infographie ne suffit pas, il vous reste le rapport de 65 pages à éplucher et, bien sûr, l’indispensable petit motion design tout lisse ci-dessous.
La politique de valorisation de ces ressources est encore un peu confuse à ce jour si l’on en croit ce magnifique lorem ipsum de la ministre mais nul doute que la Culture sera bientôt à la portée de tous les datalovers – qui connaissent déjà les données du ministère sur data.gouv.fr.
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Du côté de la Suisse, un concours récompense les meilleures applications sur les transports publics. Les Helvètes sont forts à ce jeu, je me souviens de SwissTrain que Marie Coussin (oui oui, la même) avait repéré il y a très longtemps.
La liste des vainqueurs permet de goûter à l’inventivité de nos cousins alpestres et offre naturellement des pistes alléchantes de tout ce qu’il est possible de faire dès lors que la transparence totale est faite dans les données de transports publics (suivez mon regard). A titre perso, je ne comprends rien à l’application qui a remporté le concours – d’un manque d’ergonomie stupéfiant tant sur Chrome que sur Firefox – mais quelques autres projets valent vraiment le détour.
La minute viz
L’efficacité de l’animation Sixty Seconds of Salary, pondue par Bård Edlund pour « CNN Money » (dont il a été directeur artistique), est remarquable. En 1 minute 50, elle raconte tout simplement combien gagnent en une minute des personnalités comme la star de NBA Kobe Bryant, Barack Obama ou le patron d’ExxonMobile.
L’intérêt réside évidemment dans la comparaison avec des individus plus représentatifs de la population, comme un enseignant, un médecin, ou avec le salaire minimum et le salaire médian. Et sans surprise, 1 minute 50 suffit amplement à réfléchir sur ce sujet.
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Quand nous avons essayé avec Sylvain Lapoix de mettre en scène les données liées à la fonte de la banquise, nous étions évidemment à des éons du spectaculaire Speculative Sea Level Explorer (via) de Benedikt Groß, qui s’est amusé (avec d’autres moyens) à réinventer quelques cartes de géographie physique.
Le but, plus sérieux qu’il n’y paraît, est de simuler plusieurs niveaux de montée des eaux qui pourrait survenir suite au déréglement climatique. Plusieurs villes sont modélisées, et un logiciel est même téléchargeable (versions OSX, Windows et Linux disponibles sur Github). Dans l’esprit, on est donc assez proche de l’excellent travail réalisé cet automne par le « New York Times », même si le projet de Benedikt est aujourd’hui plus « artistique » que journalistique.
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The World as 100 People (via) est une infographie assez classique mais bien pensée et assez joliment réalisé par le graphiste londonien Jack Hagley. Le principe est simple : comment se répartirait l’humanité si elle n’était composée que de 100 individus.
C’est bien l’angle qui est intéressant ici. Ce type d’infographie permet de se rendre compte avec efficacité de données abstraites comme l’accès à l’eau potable, au logement voire à un ordinateur. Les données de base sont hébergées sur le site 100people.org. Pour rigoler j’ai d’ailleurs généré une infographie en 5 minutes (montre en main) avec Infogram pour éprouver un peu le service qui évolue constamment : plutôt une bonne expérience – même s’il y a beaucoup à dire au niveau esthétique.
Veilleries
Deux trucs plutôt gentils passés dans le radar récemment et qui méritent sans doute de figurer ici – même s’ils commencent un (tout petit) peu à dater :
- The Power of Visualization’s « Aha! » Moments est un entretien avec Amanda Cox, qui est la reine de la dataviz au « New York Times » depuis 8 ans. Elle y parle notamment des dangers et des forces évidentes de la visualisation de données, ainsi que des quelques notions basiques du métier – à commencer par le datajournalisme comme travail d’équipe. Toujours inspirant.
- Global migrants: Which are the most wanted professions? (via) est une visualisation plutôt parlante (quoiqu’un peu rude à manipuler) qui explique quels métiers sont actuellement recherchés dans quels pays (immigration choisie et qualifiée). L’intérêt est de pouvoir analyser tant du point de vue du métier que du pays. Aurait sans doute mérité un format plus approprié à la lecture sur écran.